Toi, l'étranger

Toi, l'étranger, le réfugié, l'immigré
J'aimerai te dire ces quelques mots
Tu a fais preuve d'un grand courage
Courage sans borne poussé par l'espoir
Par l'adversité, le désespoir aussi
Tu as quitté ton pays, tes racines, tes biens et souvent même, les tiens
Ce n'est pas rien.
C'est même tout.
Ne recule pas devant l'épreuve qui s'annonce encore pour toi
Tu en as déjà tellement vécu !
Tu aimerai te reposer enfin
Tu aimerai aussi retourner chez toi
Mais ce n'est pas toujours possible
Si je peux te donner un conseil
Garde ta culture, elle est tout ce qui reste pour toi
Elle sera aussi tout ce que tu pourra transmettre parfois
On te somme de t'intégrer
Ne le fais pas, résiste
Tu te désintégrerai
Sans ce qui fait tes racines, tu ne serai plus rien
Ne renie pas ce que tu as été, ce que tu as vécu
C'est ton essence même
Adopte ton pays d'accueil
Mais garde ton pays d'enfance en ton cœur
En tes habitudes, en ta façon de vivre et d'être
Adopte la langue, mais ne perd pas la tienne
Adopte les coutumes, mais pratique aussi les tiennes
Apprends l'histoire, mais n'oublie surtout pas la tienne
Peu importe comment on te regardera
Peu importe ce que l'on dira de toi
Fais-en ta richesse
De cette culture que tu adopte, et de la tienne propre
Fais-en un trésor
Oui, tu es différent, et tu le sera toujours
Arabe, Africain, Balkan, Roumain, Polonais, Asiatique
Et tous les autres que j'oublie encore
Tu sera toujours étranger
Mais cela vaut mieux que l'oubli
Je parle en connaissance de cause
Je suis de la quatrième génération
Mon arrière-grand-père était Rital
Ce R qui voulait dire pudiquement réfugié
Cette culture que beaucoup d'Italiens ont renié
Jusqu'à changer les I en Y
Jusqu'à apprendre à leurs enfants la xénophobie
Envers leurs propres compatriotes
Que me reste-t-il de cette culture ?
Rien.
Ni la langue, ni la culture, ni la connaissance de ce pays
Ni même pourquoi Giovanni a quitté son village
Je n'ai jamais vu l'Italie, et ne la verrai peut-être jamais
Et tout ce qu'il en reste est mon prénom qui finit par I
Alors toi, l'étranger, le réfugié, l'immigré
Garde-les en ta vie
Quel que soit le regard qui te sera lancé
Quelle que soit la parole qui voudra te blesser
Quel que soit le prix à payer
Quel que soit l'injonction qui t'es faite de changer
C'est ta richesse, ton vrai trésor